Concessions de dragage : vers une prise en charge complète

Les canaux et les rivières sont généralement des artères vitales des économies. Il est dès lors essentiel de préserver la profondeur et le courant de ces voies d’eau de l’accumulation de sable, de boues et d’autres sédiments en procédant à des dragages en temps utile. Cette opération permet aux navires – de plus en plus grands – de passer sans encombre, mais aussi d’éviter la salinisation et les inondations. Cependant, les travaux de dragage entraînent des coûts importants que toutes les administrations ne peuvent ou ne veulent pas supporter. Une concession offre une issue envisageable. Découvrez en quoi consiste un tel contrat et comment Jan De Nul crée, sur cette base, une situation gagnant-gagnant dans des pays comme l’Équateur.

Double interview avec Dominic De Prins, Project Manager en Équateur, et Mathias Van De Vijver, Financial Manager.

En quoi consiste une concession de dragage et quels sont les types existants ?

Dominic De Prins : « D’une manière générale, nous sommes chargés de rendre et de maintenir un canal ou une rivière navigable. Nous réalisons la première mission en approfondissant le cours d’eau, et la seconde en mettant à disposition un navire pour l’entretien à long terme. Concernant le financement, différentes structures sont possibles. »

Mathias Van De Vijver : « Dans certains cas, Jan De Nul prend en charge le financement. Les coûts d’approfondissement et d’entretien sont ensuite remboursés par le biais de péages. Par exemple, chaque navire qui emprunte la voie navigable paie un droit d’accès en fonction de sa taille. Une autre possibilité est que l’autorité adjudicatrice nous rembourse en versant des paiements fixes et périodiques. Des formes intermédiaires, combinant des paiements fixes et des péages, sont également envisageables. »

Quels sont les avantages pour vos clients et pour Jan De Nul ?

Mathias Van De Vijver : « Pour les clients, c’est une solution à long terme qui leur évite d’avoir à financer eux-mêmes l’intégralité des travaux. Ainsi, les gouvernements dont la marge de manœuvre est limitée peuvent tout de même répondre aux attentes de leur population et donner une impulsion significative à l’économie locale ou nationale. »

Dominic De Prins : « Pour nous, cela signifie qu’un ou plusieurs de nos navires aura une base d’opération fixe pour une longue période. Ceux-ci s’occupent bien sûr toujours en priorité de la concession, mais peuvent aussi travailler sur des projets voisins en parallèle. C’est intéressant pour nous, car nous évitons ainsi des frais supplémentaires de mobilisation et de démobilisation et sommes plus visibles dans la région concernée. »

Quel est le revers de la médaille ?

Mathias Van De Vijver : « Dans le cas où seuls des péages sont payés en contrepartie du financement intégral, de nombreux risques sont à prendre en compte. Nous devons non seulement calculer les coûts d’approfondissement et d’entretien, mais aussi estimer le trafic maritime prévu pendant la durée de la concession et les recettes qui en résulteront. Dans certains pays, il faut ajouter à cela l’incertitude juridique et les risques politiques. Enfin, les coûts des appels d’offres augmentent avec la plus grande complexité des contrats. »

Préconisez-vous généralement vous-mêmes des contrats de concession pour certains projets ?

Dominic De Prins : « Oui. Dans les pays disposant d’un cadre juridique approprié, il arrive que nous prenions l’initiative de soumettre nous-mêmes une proposition. La première étape consiste à réaliser une étude préalable de faisabilité, que les autorités concernées approuvent ou non. Après acceptation, nous réalisons une étude de faisabilité plus approfondie, financée par les autorités. Si celle-ci est évaluée positivement, elle débouche sur un appel d’offres public auquel plusieurs parties peuvent participer, y compris des concurrents directs. »

Mathias Van De Vijver : « Il est important de souligner que la partie qui a pris l’initiative bénéficie d’un avantage dans l’appel d’offres pour la concession. Elle connaît parfaitement les risques et les opportunités et dispose d’un avantage de prix dans la procédure d’évaluation. Grâce à cette méthode, nous avons déjà remporté de beaux projets. »

Quels autres atouts pouvez-vous faire valoir lors d’appels d’offres pour des concessions de dragage ?

Mathias Van De Vijver : « Grâce à notre vaste flotte de dragage et à nos équipes expérimentées, nous disposons de ressources suffisantes pour un déploiement à long terme dans le cadre d’un projet de concession. En outre, notre santé financière inspire la confiance et nous avons déjà acquis une solide expérience en matière de concessions de dragage au fil des années. Cette expérience séduit également les clients. »

Le canal de Quayaquil devait être approfondi et est actuellement entretenu par la flotte de Jan De Nul.

Projet à l’honneur : Guayaquil, Équateur

En décembre 2018, la commune de Guayaquil et Jan De Nul ont signé un contrat de concession de 25 ans fondé sur le rendement pour le dragage d’approfondissement et d’entretien du canal d’accès de 95 kilomètres menant au port de Guayaquil. Début 2019, les travaux ont débuté, et à peine 9 mois plus tard – bien avant la date limite –, le tirant d’eau autorisé demandé de 12,5 mètres était atteint.

Au total, quatre dragues autoporteuses à élindes traînantes de taille moyenne et la drague à désagrégateur Ibn Battuta ont dragué environ 25 millions de mètres cubes de sédiments ainsi que de dures formations rocheuses.

Grâce au chenal d’accès maritime approfondi, le port de Guayaquil a pu accueillir pour la première fois en 2019 un navire Neo-Panamax : l’APL Esplanade, d’une capacité de chargement de 14.000 TEU. Un jalon historique pour le pays !

Un système de péage sans accroc

En parallèle, le contrat d’entretien de 25 ans se déroule comme prévu. En échange de la garantie du tirant d’eau, nous imposons des péages à tous les navires qui utilisent le canal d’accès. Le tarif est déterminé en fonction du tonnage brut des navires. Plus le navire est grand, plus le tarif est élevé. Peu importe que le navire soit entièrement chargé ou non.

Cerise sur le gâteau, nous installons également un système VTS (Vessel Traffic Service) que nous allons confier ensuite aux autorités portuaires. Le VTS est comparable à une tour de contrôle dans les aéroports, mais pour le trafic maritime. Ce système de pointe rendra la gestion et le contrôle du trafic maritime plus efficaces et plus sûrs.

Un canal fluvial achevé en 2022

Le projet de Guayaquil se compose géographiquement de deux voies navigables. D’une part, il y a le canal d’accès maritime aux ports au sud de Guayaquil. D’autre part, le projet porte aussi sur le canal fluvial, ou la rivière Guayas, donnant accès aux terminaux portuaires fluviaux au sud-est de la ville. En janvier 2022, nous avons achevé l’approfondissement de ce canal fluvial pour permettre aux navires ayant un tirant d'eau jusqu’à 7,5 mètres de passer. Même s’il s’agit essentiellement de vraquiers et non de porte-conteneurs, cette activité donne un nouveau souffle à l’économie locale.